Sale mois de septembre dans les rues de Clermont-Ferrand. Jusqu’à la fin de la semaine dernière, la liste cumulée des actes de violence commis sur la voie publique était déjà longue : passage à tabac de quatre piétons devant le local du Bastion social, rue de la Treille ; trentenaire blessé à coups de couteau près de la gare SNCF ; jeune homme dans un état critique après avoir été frappé à la tête avec un tesson de bouteille lors d’une rixe, place du Changil ; couple agressé pour un téléphone, près du square d’Assas.
Le bilan – non exhaustif – s’est alourdi de façon tragique pendant le week-end écoulé, avec deux crimes distincts commis en l’espace de quelques heures : un meurtre à l’arme blanche, samedi 22 septembre au soir, place de Jaude, et le viol d’une étudiante de 22 ans, place Salford, le matin même, par un inconnu que les policiers tentent d’identifier.
Une jeune femme violée en pleine rue à Clermont-Ferrand
Inquiétude et colère
À ce macabre enchaînement s’ajoutent les coups infligés à un jeune couple qui sortait de discothèque, dans le quartier Fontgiève, samedi matin encore. Dans cette dernière affaire, un récidiviste de 21 ans a été interpellé et condamné, dès lundi, à dix-huit mois de prison ferme.
Cette succession d’agressions de tous ordres, en pleine rue, provoque inquiétude et colère. Sur le site Web et la page Facebook de La Montagne, les réactions s’accumulent par centaines. Les internautes dénoncent un centre-ville « de plus en plus mal famé », dans lequel « la sécurité des habitants et des passants n’est plus assurée ».
« Clermont était une ville sûre, maintenant c’est fini », s’agace un abonné. « L’hypercentre devient une zone de non-droit. On ne sort plus sans avoir la peur au ventre », ajoute une lectrice, gagnée comme beaucoup d’autres par un « sentiment croissant d’insécurité ».
Le climat actuel et les derniers événements sont évidemment suivis de très près par la direction départementale de la sécurité publique. « Un viol dans la rue et un homicide (*) en l’espace d’une journée, c’est bien sûr dramatique, mais cela relève vraiment de l’exceptionnel. Dans toutes les grandes agglomérations, le centre-ville est le secteur le plus criminogène. Clermont n’échappe pas à la règle », pondère le capitaine Caroline Sauvat, de l’état-major de la DDSP 63.
« Un viol dans la rue et un homicide en l’espace d’une journée, cela relève vraiment de l’exceptionnel »
Dans la capitale auvergnate comme ailleurs, la grande majorité des actes violents commis sur les places et trottoirs surviennent de nuit et en fin de semaine. « Il y a un souci avec les sorties de discothèques, entre le jeudi soir et le dimanche matin, poursuit le capitaine Sauvat. Dans ce créneau-là, les voleurs et les agresseurs ciblent une population fragilisée, car souvent jeune et alcoolisée. Mais là encore, ce n’est pas propre à Clermont. »
Un homme blessé de plusieurs coups de couteau devant la gare de Clermont-Ferrand (15/09/2018)
Au-delà de l’effet « loupe » sur la série en cours, la DDSP 63 assure par ailleurs que la délinquance dans la préfecture puydômoise reste « dans la fourchette basse des villes de même taille ». Une analyse qui semble confirmée par les chiffres.
Sur huit mois, les atteintes physiques sont en baisse
Faute de données spécifiques concernant les agressions sur la voie publique, quartier par quartier, il faut s’en remettre au recensement global des atteintes volontaires à l’intégrité physiques des personnes (AVIP), qui incluent aussi – entre autres – les violences intrafamiliales. À Clermont-Ferrand, ces AVIP sont passées de 1.405, sur les huit premiers mois de 2017, à 1.360 sur la même période en 2018. Soit une baisse de 3,2 %. Le recul est encore plus marqué en matière d’agressions dites « crapuleuses » (au premier rang desquelles les vols avec violences) : moins 20 % sur un an. Sachant que dans le même temps, le taux d’élucidation des AVIP a progressé de 35 % entre le 1er janvier et le 31 août 2018.
Comment la ville de Clermont-Ferrand a-t-elle dépensé son budget ? (juin 2018)
« La concomitance des deux faits très choquants, le week-end dernier, crée un émoi tout à fait compréhensible. Mais cela ne doit pas faire oublier tout le travail de présence des forces de l’ordre sur le terrain, au quotidien », ajoute-t-on du côté de la préfecture.
Un effort particulier a notamment été fait dans les secteurs qui concentrent de nombreux établissements festifs, comme la place Gaillard. Sur ces points sensibles, des patrouilles fixes sont déployées, la nuit venue, pour prévenir et/ou réprimer tout acte de « prédation ».
(*) Il s’agit du deuxième meurtre de l’année à Clermont-Ferrand, après celui d’un septuagénaire condamné plusieurs fois pour trafic de stupéfiants et retrouvé mort dans le coffre de sa voiture, le 12 juin, dans le quartier Saint-Jacques.
La réaction du maire. « Par-delà l’émotion légitime que ces actes criminels suscitent, il est de mon devoir de 1er magistrat d’exercer mes compétences avec responsabilité. J’ai eu une réunion aujourd’hui avec le Préfet pour évoquer ces crimes. Nos rencontres sont régulières pour évoquer les questions de sécurité », réagit ce mardi le maire de Clermont-Ferrand Olivier Bianchi dans un communiqué. « Pour répondre de la manière la plus efficace possible aux défis de sécurité, c’est à une bonne coopération police nationale-police municipale-justice que nous travaillons. »
Rappelant les efforts financiers réalisés en matière de vidéoprotection (450 000 euros), le premier magistrat de la cité auvergnate tient à préciser les prérogatives de chacun : « Le maire exerce ses responsabilités en matière de tranquillité publique et de prévention ; la sécurité des personnes et des biens relevant de la police nationale. »
Stéphane Barnoin